PROCÈS VERBAL DE LA RÉUNION, PARTIE II


Communiqué de presse des Nations Unies REF/811, 20 juillet 1979

Réunion sur les Réfugiés et les Personnes Déplacées dans l’Asie du Sud-Est assiste à d’autres discours (Reçu du Service de l'Information des Nations Unies, Genève)

La réunion sur les réfugiés et les personnes déplacées dans l’Asie du Sud-Est convoquée par le Secrétaire Général Kurt Waldheim pour concevoir des solutions concrètes à ce qu’il appelait le « problème atroce » de ces réfugiés, s’est poursuivie cette après-midi à Genève, avec des discours par la République fédérale d’Allemagne, l’Indonésie, le Canada, la Thaïlande, le Danemark, la Chine, Israël, les Pays-Bas, la Suède, l’Autriche, la Norvège, le Nigéria, la Suisse, l’Espagne, le Brésil et le Costa Rica.

Deux autres réunions sont prévues pour demain, le 21 juillet, avec les discours des délégations suivantes programmés pour la session du matin : Australie, États-Unis, Nouvelle-Zélande, Finlande, Union soviétique, Luxembourg, Saint-Siège, Argentine, République de Corée, Pakistan, Grèce, Tunisie, Yougoslavie, Chili et Mexique. 

Discours prononcés

GUNTHER VAN WELL, Secrétaire d’État de la République fédérale d’Allemagne : Les chefs des gouvernements des Lands de la République fédérale d’Allemagne se sont mis d’accord, lors d’une réunion avec le Chancelier Fédéral tenue le 6 juillet, que la République fédérale d’Allemagne devrait augmenter le nombre d’offres d’accueil aux réfugiés pour faire un total de 10 000 incluant celles déjà faites. Cette décision a été prise en dépit du fardeau déjà imposé par les importantes arrivées d’Allemands venant de l’Europe de l’Est — environ 58 000 en 1973 — et le nombre croissant de personnes demandant l’asile, environ 33 000 en 1978.

Depuis 1975, la République fédérale d’Allemagne a rendu disponible une somme totale d’environ 22 millions de Deutsche Marks1 pour l’aide aux réfugiés indochinois dans l’Asie du Sud-Est. La République fédérale d’Allemagne rend maintenant disponible une somme supplémentaire de 7 millions de Deutsche Marks. De plus, elle fournira dans les prochains mois — dépendamment d’une approbation parlementaire — une somme supplémentaire de 20 millions de Deutsche Marks. Elle aura fourni à ces personnes durement touchées un total d’environ 50 millions de Deutsche Marks, y compris 32 millions de Deutsche Marks pour l’année 1979 uniquement. L’aide fournie par des organismes privés dans la République fédérale d’Allemagne a atteint un total de 12,5 millions de Deutsche Marks. La République fédérale d’Allemagne recommandera fortement d’augmenter l’aide fournie par la communauté européenne. La République fédérale d’Allemagne est prête à fournir, en 1980 aussi, une aide augmentée au développement, par la voie bilatérale ainsi que par le biais du Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations Unies (HCR), pour la mise en œuvre de projets concrets encourageant l’intégration des réfugiés de l’Indochine dans des pays en voie de développement. La République fédérale d’Allemagne espère que ces mesures contribueront à une solution sur le long terme, du problème d’intégration des réfugiés dans des pays tiers. 

MOCHTAR KUSUMAATIIADJA, Ministre des Affaires Étrangères de l’Indonésie : En ce qui concerne les états de premier asile, « lorsque le fardeau des réfugiés devient insupportable en raison de ses effets sur la sécurité, ainsi que sur la stabilité politique et économique de ces pays, on ne peut pas raisonnablement s’attendre à ce que ces pays continuent à accueillir encore plus de réfugiés, s’il n’y a pas d’engagements résolus pour assurer un plus grand nombre d’offres d’accueil ».

Les problèmes devraient être abordés non seulement dans les camps « où ces réfugiés vivent dans la misère, mais abordés aussi à leur origine ». L’accord entre le Vietnam et le HCR pour les départs organisés devrait être élargi pour inclure tous ceux « qui souhaitent quitter le Vietnam pour quelque raison que ce soit ». 

L’aide internationale aux pays de premier asile « est extrêmement inadéquate » lorsqu’on la compare aux besoins des réfugiés en Asie du Sud-Est. Comme l’étude de faisabilité a été terminée, on espère que le centre de traitement du HCR sur l’île de Galang sera opérationnel bientôt. 

Cependant, c’est l’accueil qui est la clé du problème et les pays développés doivent augmenter leurs offres et faire accélérer le processus d’accueil. Ils pourraient même opérer eux-mêmes comme pays de premier asile pour réduire la pression sur les pays de l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE). 

Les commentaires précédents concernaient les boat people. En ce qui concerne le problème des « personnes déplacées par voie de terre »2 en Thaïlande, il « ne pourra être éliminé que lorsque le conflit kampuchéen sera résolu ». 

FLORA McDONALD, Secrétaire d’État pour les Affaires Étrangères du Canada:

Le Canada a décidé d’accepter jusqu’à 50 000 Indochinois à partir de cette année jusqu’à la fin de 1980. « Cela signifie que les pays de premier asile peuvent compter sur le fait que le Canada accepte jusqu’à 3000 réfugiés par mois. Nous mettons au défi d’autres pays d’en faire autant. » 

Le Canada est « en partenariat » avec des citoyens et des organismes grâce auxquels le gouvernement parrainera un réfugié pour chaque réfugié parrainé à titre privé. Les gouvernements provinciaux du Canada ont été consultés et appuient ce plan. 

Au niveau des finances, le Canada annonce 500 000 $ supplémentaires pour contribuer au programme du HCR pour l’Indochine. 

« Faire tomber la fièvre ne signifie pas la fin de l’infection. » On ne peut pas arbitrairement séparer les diverses dimensions du problème, tels que le premier asile ou l’accueil, et les appeler humanitaires, puis rejeter les causes de l’exode comme étant politiques. 

« Les pays d’exode devraient abandonner les politiques qui causent les départs et les pratiques qui les encouragent. Il n’est pas moins humanitaire d’exiger qu’ils s’occupent de leurs citoyens sans discrimination et de manière humaine. C’est notre humanité qui réclame à grands cris la fin de cette violation flagrante, continue et atroce des droits humains. » 

Aucun plan ne peut fonctionner si les pays d’exode — le Vietnam, le Kampuchéa et le Laos — n’acceptent pas leurs responsabilités. « Ces gouvernements ont une responsabilité première d’assurer que les départs de leurs citoyens se réalisent de manière ordonnée sans menace ou sanction quelconque. » 

SIDDHI SAVETSILA, Ministre Attaché au Cabinet du Premier Ministre de la Thaïlande : Met en garde sur l’échec de la réunion.

La préoccupation de la Thaïlande porte sur les « cas par voie de terre » qui n’avaient pas assez attiré l’attention de la communauté internationale. « Plus de la moitié des personnes déplacées dans les camps dans l’Asie du Sud-Est — 170 000 immigrants illégaux — sont des “cas par voie de terre” en Thaïlande. » « Et depuis décembre, le nombre de “cas par voie de terre” a augmenté par plus de 40 000, sans compter les 40 000 immigrants illégaux venant du Kampuchéa. » 

Mais les offres d’accueil pour les « cas par voie de terre » ne sont pas proportionnelles à leur nombre ; seulement environ 35 pour cent des offres d’accueil ont été reçues de la part des pays tiers. 

Les pays de l’ANASE ont fait appel au Vietnam à plusieurs reprises pour résoudre le problème de manière constructive — « en vain ». « Une fois que c’était évident que l’exode était systématiquement encouragé, les pays de l’ANASE ont décidé individuellement de prendre des mesures fermes et efficaces pour prévenir d’autres arrivées d’immigrants illégaux depuis l’Indochine. » 

Réaffirmant l’intention de son gouvernement de contribuer sa part équitable, il a dit qu’il apprécierait l’aide internationale « à condition qu’une telle aide soit rendue à travers les autorités thaïlandaises et la Croix-Rouge thaïlandaise ». 

  1. Savetsila a proposé trois champs d’action immédiate : s’occuper du problème à sa source par un arrêt de « l’expulsion massive de population », une augmentation importante des offres d’accueil, particulièrement pour les personnes déplacées par voie de terre, et l’établissement de « centres d’attente » pour les candidats au départ dans les pays d’origine et sous supervision internationale. 

LISE OSTERGAARD, Ministre d’État pour les Affaires Étrangères du Danemark : Le Danemark augmentera de 100 pour cent, c’est-à-dire au nombre de 1000, le nombre de réfugiés qu’il accueillera, atteignant un total de 1200 avant la fin de 1979.

Mais le Danemark offrira également l’asile permanent à tous les réfugiés secourus en mer par les navires sous le pavillon danois dans le cas où ils ne seraient pas accueillis par leurs pays d’asile prioritaires. 

Le Danemark augmente également sa contribution au programme du HCR pour l’Asie du Sud-Est de 10 millions de couronnes danoises, élevant sa contribution totale à 40 millions de couronnes danoises pour l’année. 

Il y a également un besoin d’étendre les opportunités pour le Haut Commissaire de résoudre les problèmes des réfugiés, généralement en lui permettant d’offrir une aide financière aux pays en voie de développement qui sont prêts à accueillir des réfugiés. À cette fin, le Danemark est prêt à contribuer jusqu’à 25 millions de couronnes danoises pour la première année. 

Cette réunion n’est pas le moment opportun pour discuter de politique. La présence du Vietnam à la réunion « est un signe qu’il existe un fondement et une bonne volonté de poursuivre sur la voie par laquelle l’entente » pour les départs ordonnés devrait être considérée comme étant seulement une première étape. 

ZHANG WENJIN, Vice-Ministre des Affaires Étrangères de la Chine : « La création d’une telle tragédie humaine ne peut pas être tolérée par l’humanité civilisée. » Son pays « ne peut faire autrement qu’exprimer son profond regret et condamner solennellement le pays qui est le premier coupable responsable de telles atrocités ».

Zhang a salué les pays de premier asile de l’ANASE et le HCR pour leurs efforts à ce jour. Mais il est « injuste » que le Kampuchéa, un membre des Nations Unies, n’ait pas été invité à la réunion. 

Jusqu’à la fin de février cette année, 202 000 réfugiés « ont été poussés vers la Chine, y compris des citoyens vietnamiens d’origine chinoise ». Depuis lors, la moyenne mensuelle a dépassé 10 000. Jusqu’à présent, 200 000 ont été accueillis mais « dans certaines régions du Vietnam et des districts aux frontières de la Chine, une politique de cordon sanitaire a été mise en place pour continuer de pousser des citoyens vietnamiens vers la Chine ». 

Pour aider les réfugiés déjà en Chine, une somme équivalente à 450 000 $ a été dépensée et le taux des arrivées ne diminue pas. Cependant, la Chine est prête à contribuer près de 1 000 000 $ au programme du HCR pour l’Indochine. 

En ce qui concerne les causes de cette situation, le délégué chinois a dit que le Vietnam « s’est livré ces dernières années au militarisme et s’est laissé tenter par l’agression et l’expansion. Chez eux, les autorités vietnamiennes appliquent une dictature militaire et pratiquent le génocide, conduisant ainsi à l’exode des réfugiés ». 

Cela signifie que le Vietnam déplace « ses graves difficultés économiques vers les pays voisins ». 

« Une superpuissance », en appuyant le Vietnam, « révèle les intentions de cette même superpuissance qui tente de pêcher en eau trouble et de se mêler des affaires de l’Asie du Sud-Est ». 

« Plus on accueille, plus ils expulseront et la situation continuera à se détériorer », à moins qu’on touche aux causes profondes. Si ces causes ne sont pas confrontées, « nous ne pouvons guère prétendre avoir répondu aux responsabilités humanitaires et morales qui nous incombent à tous ». 

Zhang a mis en avant cinq propositions : 

Des offres des pays d’accueil et des pays de traitement plus significatives et, en plus, l’aide financière aux pays de premier asile; 

— L’acceptation vietnamienne des réfugiés qui choisissent de retourner avec des garanties de sécurité pour leur personne et leur propriété ainsi que l’accueil approprié et le départ ordonné pour tous ceux qui souhaitent quitter;

— L’obligation des navires de porter secours aux « boat people ».

— Tous les pays devraient fournir des fonds pour l’aide aux réfugiés, suspendre leur aide économique au Vietnam et réaffecter ces fonds pour l’aide aux réfugiés jusqu’à ce que le Vietnam change sa politique menant à l’exode; et

— Le Vietnam doit être poussé à changer sa politique visant à « créer et exporter » des réfugiés et mettre fin à sa « discrimination contre et persécution des minorités nationales et de citoyens chinois au Vietnam ».

DAVID LEVI, Ministre de la Construction, du Logement et de l’Intégration d’Israël : Les nations du monde assistent à un spectacle de navires pleins de réfugiés en détresse et à la dérive en haute mer. Quelques-unes ont réagi à ce spectacle avec une « émotion sincère ». D’autres sont restées indifférentes. Pour Israël, ce drame humain a éveillé les souvenirs « d’expériences très personnelles » qui seront endurés pour toujours. 

Il y a seulement une génération depuis que des navires chargés de réfugiés juifs ont traversé les mers et les océans, fuyant la terreur du régime nazi et l’extermination. Toutes les nations du monde, sans exception, ont refusé de les accueillir. Six millions de juifs, y compris un million et demi d’enfants en bas âge, ont péri « dans le pire holocauste jamais connu par l’homme. L’exode de juifs déracinés cherchant des foyers a continué après la défaite d’Hitler. Des milliers ont atteint la côte d’Israël dans des bateaux fragiles et avaient parfois besoin de nager jusqu’au rivage. Ils ont ainsi rejoint un peuple qui a gagné sa liberté en 1948 au prix d’une bataille héroïque et meurtrière ». L’État d’Israël constituait une garantie qu’il n’y aura plus jamais de scènes aussi horribles. Ainsi, il parle en tant que représentant d’un peuple qui a connu la souffrance et la persécution et son Premier Ministre était le premier de lancer un appel à toutes les nations pour aider à trouver une solution au problème des réfugiés vietnamiens. 

En tant que Ministre responsable de l’accueil des immigrants, il assume la responsabilité pour le transfert et la réception de réfugiés vietnamiens en Israël. Israël a offert l’asile au premier groupe de réfugiés vietnamiens dès juin 1977. De « l’action ferme » est nécessaire, « plutôt que seulement des mots ». Par conséquent, Israël a décidé d’accepter 200 de plus. L’espoir d’Israël est que les nouveaux réfugiés s’établiront et s’intégreront avec autant de succès que les premiers deux groupes auxquels il avait offert l’asile. Israël était prêt à partager avec les gouvernements et les institutions intéressés ses expériences dans le domaine de l’intégration des immigrants. 

C.A. VAN DER KLAAUW, Ministre des Affaires Étrangères des Pays-Bas : La conférence est confrontée au sort tragique d’innombrables réfugiés en Asie du Sud-Est, une situation dont la détérioration n’a pas ralenti par les efforts humanitaires de grande échelle. Les gouvernements participant à la conférence ont l’obligation d’utiliser ces deux jours pour parvenir à des « solutions concrètes et permanentes ».

Les Pays-Bas reconnaissent le fait que la situation de l’Asie du Sud-Est est un problème de réfugiés mondial. D’autres régions méritent eux-aussi l’attention de la conférence. Il a un « profond respect » pour les nombreux pays qui ont accepté leur responsabilité et pour leurs « précieux efforts ». La récente conférence panafricaine sur les réfugiés, tenue à Arusha, République unie de Tanzanie, est un « bon exemple » de cette attitude. 

Les Pays-Bas appuient entièrement les principes acceptés par la communauté européenne comme base pour la conduite ordonnée des relations entre états, y compris les principes d’asile et de non-refoulement comme normes humanitaires acceptées. Ils appuient également l’obligation des propriétaires de navires et les capitaines de secourir les réfugiés en haute mer. 

La situation en Asie du Sud-Est ne peut pas être résolue par les pays de la région seuls. La recherche d’une solution durable est la responsabilité de la communauté internationale dans son ensemble. Beaucoup a été fait, mais plus de contributions financières et plus d’offres d’accueil sont nécessaires. Un effort coordonné doit également considérer le fait que certains groupes sont plus défavorisés que d’autres. 

Il appuie fortement les propositions du Haut Commissaire. Il n’y a aucun besoin pour des nouvelles structures. L’intérêt des réfugiés peut être le mieux servi en renforçant la relation entre le Haut Commissaire et les pays d’origine des réfugiés, en renforçant son rôle en tant que coordonnateur d’assistance bilatérale et multilatérale et en faisant passer par son bureau les fonds supplémentaires rendus disponibles. 

HANS BLIX, Ministre des Affaires Étrangères de la Suède : Il a décrit le problème comme étant composé de trois énormes groupes de personnes — les 200 000 boat people, ceux du Kampuchéa soit en Thaïlande ou repoussés vers leur pays et les Laotiens qui sont arrivé en Thaïlande.

Le rapatriement volontaire « est une possibilité distincte » qui devrait être examinée, puisque, une fois la paix revenue au Kampuchéa, de nombreux réfugiés en Thaïlande pourraient souhaiter revenir. 

Les derniers six mois de guerre au Kampuchéa ont sévèrement perturbé l’agriculture. « La communauté internationale doit aider à réduire le risque imminent de famine. » 

Pour les « boat people » vietnamiens, « la solution recherchée doit respecter le principe garantissant que les gens ont le droit de quitter leur propre pays » et la règle très ancienne que les personnes en danger en mer doivent être secourues. 

En ce qui concerne l’accueil, la Suède augmente par 750 son offre actuelle de 1500 places. Mais le fardeau des pays de premier asile doit être réduit au moins financièrement par des dons externes généreux pour des camps de transit. 

Le troisième plan d’action que la Suède prévoit est par la conclusion d’un accord entre le Vietnam et le Haut Commissaire pour le départ organisé de personnes souhaitant partir. M. Blix a encouragé le Vietnam de poursuivre ce plan d’action tout en créant des « conditions sociales et économiques tel qu’aucun groupe de son peuple et, en particulier, aucun groupe ethnique, se sente que son seul choix est de quitter le Vietnam de la manière qui a choqué le monde. » 

WILLIBALD PAHR, Ministre des Affaires Étrangères d’Autriche : Il a proposé une large consultation internationale dans le cadre des Nations Unies — peut-être même dans la forme d’une conférence — visant donner au Haut Commissaire de nouvelles et plus importantes dispositions.

Il s’est interrogé sur les raisons de l’exode indochinois et trouvait qu’il était « un signe honteux de notre époque que nous devons nous réunir ici pour essayer de maîtriser une situation à laquelle nous ne pouvons plus rester indifférents ». 

Les personnes qui ont été forcées à demander l’asile « sont victimes de violations des droits humains », que ce soit pour des raisons politiques, religieuses ou raciales. Cela reste également valable pour ceux qui sont forcés à quitter en raison de la famine et la détresse. 

L’Autriche a toujours été un pays de premier asile et seule l’aide internationale lui a permis de surmonter les moments de crise. Malgré les arrivées de réfugiés continues, l’Autriche augmente son quota de 500 et prévoit de fournir de la nourriture pour alléger le fardeau et d’apporter une aide financière plus importante au Haut Commissaire. 

L’exode de l’Indochine ne finira que « lorsque tout le monde au Vietnam et au Cambodge a eu une chance de vivre avec la liberté et la dignité propres aux êtres humains ». 

KNUT FRYDENLUND, Ministre des Affaires Étrangères de la Norvège : La réunion devrait se concentrer sur les aspects humanitaires de la tragédie. « Dans l’intérêt des milliers de personnes qui, chaque jour, risquent leurs vies, concentrons-nous aujourd’hui sur les mesures d’urgence nécessaires pour sauver des vies. Cependant, ceci ne signifie pas que nous ne devrions pas chercher des solutions par des moyens politiques, le cas échéant. »

L’accueil est le problème principal. C’est pourquoi la Norvège augmente le nombre d’Indochinois qu’elle accueillera de 900 à 3000. La pression sur les pays de premier asile sera allégée par d’autres pays grâce à une aide financière. La Norvège ajoutera 2 millions de dollars aux 15 millions qu’elle a contribués pour aider aux réfugiés de l’Asie du Sud-Est au fil des années. 

Frydenlund a lancé un appel ferme au gouvernement vietnamien pour qu’il veille à ce que les personnes qui veulent partir, puissent le faire de manière organisée. En tant qu’état maritime éminent, la Norvège a réaffirmé l’obligation des « états de pavillon de venir en aide aux personnes en détresse en mer, conformément au devoir des capitaines de navires ». Il a lancé un appel au respect universel du principe selon lequel l’état où un navire fait son premier arrêt prévu après un sauvetage « devrait permettre aux réfugiés de débarquer et leur offrir un asile temporaire ». Dans ce contexte, le Ministre a annoncé un fonds norvégien de 750 000 $ pour un projet de secours appelé « Un bateau pour le Vietnam », sur le point d’entrer en vigueur. 

KOLUYEMI ADENJI (Nigéria): Le problème des réfugiés en Asie du Sud-Est « ne relève pas autant des chiffres, mais plutôt de la complexité historique et politique du problème et de l’incertitude vis-à-vis de l’avenir. » La réunion devrait mettre de côté ces complexités et se concentrer sur les incertitudes. La tragédie sera atténuée si le principe du non-refoulement est respecté. Une autre obligation qu’il faudrait respecter est celle des capitaines en mer de venir au secours des victimes.

« Les départs de masse et non réglementés de ces réfugiés, mettant à l’épreuve les dispositions et créant des problèmes de sécurité dans les pays voisins, étaient au cœur de la question. » Il appuyait le plan de départ organisé. 

Adeniji a exprimé son espoir que la situation des « boat people » et les inquiétudes humanitaires qu’elle a engendrées « durera plus longtemps que cette crise immédiate et marquera le début d’efforts internationaux véritablement concertés pour s’attaquer au sort généralement tragique des réfugiés ». 

En Afrique aussi, il y a des problèmes de réfugiés, en particulier en Afrique méridionale, où les réfugiés sont victimes de l’apartheid. Il y a 4 millions de réfugiés en Afrique et ils représentent 50 pour cent des réfugiés dans le monde. 

Pour sa part, le Nigéria a décidé de doubler sa contribution au Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations Unies à une somme équivalente à 120 000 francs suisse. 

KURT FURGLER, Chef du Département Fédéral de la Justice et Police de la Suisse : Les sources du problème des réfugiés vietnamiens sont bien connues. Celles-ci incluent la guerre et ses conséquences de misère, de famine et de non-respect systématique des droits humains. Ces problèmes devraient être analysés et surmontés, puisque l’objectif ultime de l’action internationale devrait être d’aborder le mal à sa source.

La Suisse est prête à offrir une contribution considérable pour cette tâche. L’offre d’asile aux personnes en détresse fait partie de ses traditions. En ce moment, environ 35 000 réfugiés ont été accueillis sur son territoire. En ce qui concerne les réfugiés vietnamiens, le gouvernement a décidé d’en accueillir 3000 d’ici la fin de 1980. Cependant, comme contribution spéciale au transfert le plus rapide possible des réfugiés se trouvant déjà dans des camps de transit, il a décidé d’accélérer ses offres d’accueil pour atteindre le but de 3000 par la fin de 1979, un an plus tôt que prévu au début. 

La Suisse a déjà offert l’asile à 1650 réfugiés indochinois. Elle est prête à offrir des contributions encore plus importantes et l’objectif de 3000 n’est pas le maximum d’aide qu’elle a l’intention de fournir. 

CARLOS ROBLES PIQUER, Secrétaire d’État pour les Affaires Étrangères d’Espagne : Tous les gouvernements ont « l’obligation morale » d’aider à trouver une solution aux « pénibles conséquences » de l’horrible tragédie vécue par la communauté mondiale dans le passé récent. Le problème comporte deux volets : l’un d’ordre politique, l’autre économique. L’importance politique est implicite dans les difficultés éprouvées dans l’effort de trouver une solution durable au problème. On a proposé que la solution idéale serait le rapatriement volontaire, mais ce n’est pas toujours viable.

La seule alternative est l’accueil dans un pays d’asile. La situation requiert l’offre d’asile durable dans les pays les plus près des pays d’origine des réfugiés. Il serait ainsi possible de les déménager à faible coût et les pressions sociales seront minimisées. 

L’action internationale devrait viser à atteindre quatre objectifs principaux. Premièrement, l’entente déjà conclue avec le pays d’origine devrait être élargie pour permettre l’établissement de centres de départ de l’intérieur du Vietnam. Deuxièmement, des centres de transit devraient être organisés aussi près que possible de la péninsule vietnamienne. Troisièmement, des conditions devraient être créées pour permettre l’adaptation des réfugiés aux conditions locales. Quatrièmement, un corps bénévole international devrait être mis sur pied pour aider avec le problème des réfugiés. 

SERGIO CORREA DA COSTA (Brésil): Les délégués, en essayant de surmonter le problème humanitaire des réfugiés sud-est asiatiques, « ne doivent pas oublier les réalités politiques sous-jacentes ». 

Toute solution durable aurait besoin de considérer « non seulement sa base régionale, mais aussi de faire appel aux efforts des pays qui, dans le passé, avaient des responsabilités coloniales dans la région indochinoise », ainsi que ceux qui ont été impliqués dans les conflits « qui ont ravagés la région pendant plus que 30 ans ». 

La politique d’immigration du Brésil est guidée par les besoins de développement du pays. Les migrations internes, qui impliquent des dizaines de millions d’individus, ne sont certainement pas les moindres de ses problèmes. Ainsi, le Brésil a seulement une petite marge pour accueillir des nouveaux groupes de personnes. 

Néanmoins, le Brésil offre une « contribution de financement spécial » au Haut Commissariat pour soutenir les centres de traitement en Asie du Sud-Est. 

MANUEL FERER-JIMENEZ (Costa Rica): Ce dont nous avons besoin urgemment est une amélioration des institutions internationales des droits humains et du droit international. Un nouveau mécanisme est également requis en ce qui concerne les droits et les obligations des états concernant le principe de l’asile. Le but est de rendre les conditions pour le respect de ce principe plus flexibles.

Le problème des réfugiés ne devrait pas devenir le fardeau d’un seul état, car il est la responsabilité de la communauté mondiale tout entière. Les pays dont la situation économique et sociale est mise en péril par le problème des réfugiés, ont le droit à l’assistance, fournie dans un programme sur le long terme et coordonné de manière multilatérale. L’aide fournie par des organismes non gouvernementaux, surtout ceux de caractère religieux, ne devrait pas être négligée. 

Le Costa Rica a décidé de retirer son offre d’accueillir 100 réfugiés vietnamiens. La capacité du pays pour l’aide aux réfugiés a été débordée par les arrivées de réfugiés du Nicaragua voisin. Le nombre total de réfugiés de ce pays recevant de l’aide du Costa Rica s’élevait à deux et demi pour cent de la population totale du Costa Rica. Lorsque la situation reviendra à la normale et les réfugiés retourneront chez eux, le Costa Rica pourrait reprendre sa coopération avec le HCR pour l’aide aux réfugiés vietnamiens. 

Le texte qui suit est une traduction libre effectuée par Yanko Kalem depuis la page web https://boatpeoplehistory.com/archives-3/kd/minutes-of-the-meeting/ii/

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UN/Kurt Waldheim Files/ S-0901/0007/02 United Nations Press Release Meeting on Refugees and Displaced Persons in Southeast Asia Hears More Statements, 20 July 1979.

References

  1. Le texte original emploie un code de devise. Nous utiliserons les noms de monnaies au complet à des fins de clareté.
  2. L’équivalent anglais de « personnes déplacées par voie de terre », utilisé dans le texte original, est « land people ».